ALT

La faim cachée

Dans les pays pauvres, on peut être obèse et, en même temps, souffrir de malnutrition. L’alimentation industrielle à très bas prix n’apporte pas les nutriments et les vitamines nécessaires à la préservation de la santé. C’est le phénomène de la « faim cachée ».

Il fut un temps où l’on rêvait à ce jour où tous les hommes sur Terre pourraient manger comme – c’est-à-dire autant – que les Occidentaux. Mais aujourd’hui, 815 millions d’humains se couchent le ventre vide ou presque. Ils n’étaient « que » 777 millions en 2015.

Au malheur de ceux qui ne reçoivent pas assez s’ajoute désormais l’inquiétude pour ceux qui dans les pays les plus pauvres engloutissent trop – infiniment trop – de mauvaises calories. En Afrique, où l’on peut encore mourir de faim du Soudan au Nigeria, 10 millions d’enfants sont considérés comme obèses ou en surpoids. (Réf. étude OCDE « Distinguer sécurité alimentaire urbaine en Afrique de l’Ouest », mai 2018). Ce paradoxe n’illustre pas l’élargissement du fossé entre riches et pauvres. En Afrique, les trop gros ne sont souvent guère plus favorisés que les affamés. Cette réalité se constate au Moyen-Orient, en Asie du Sud-Est, dans les îles du Pacifique, en Chine, en Inde…

Ceux qui ont juste assez de moyens pour échapper à la faim n’ont souvent accès qu’à une nourriture occidentalisée à bas prix, de très mauvaise qualité parce que saturée de mauvaises graisses, de sucres et de sel.

Content image
x
Graphique : Prévalence du surpoids et de l’obésité chez l’adulte
Graphique : Prévalence du surpoids et de l’obésité chez l’adulte

L’urbanisation qui favorise la sédentarisation et éloigne les populations des zones de production de fruits, de légumes, de céréales empêche le corps de dépenser les calories dont il a été bourré. C’est comme cela que l’obésité devient un fléau mondial qui traîne derrière lui le sinistre cortège des maladies chroniques d’origine nutritionnelle. Des populations entières n’ont été libérées du spectre de la famine que pour souffrir du diabète, de maladies cardiovasculaires, d’hypertension et de cancers des reins, de l’œsophage et du foie.

Un autre phénomène s’avère particulièrement inquiétant. Ceux qui, en apparence, disposent d’assez – et même de trop – de nourriture souffrent en fait d’une « faim cachée ». En effet, les aliments qu’ils consomment ne leur apportent pas les vitamines et les nutriments indispensables. Les carences en fer, en iode, en vitamine A affaiblissent le système immunitaire des adultes et ralentissent dramatiquement la croissance intellectuelle et physique des enfants. Les conséquences de la faim cachée sur le développement des pays pauvres sont déjà dévastatrices. La solution consiste à « désoccidentaliser » l’alimentation. Le Sénégal a lancé un plan pour les années 2018-2022 dans le but de relancer l’agriculture familiale afin que les plus pauvres puissent disposer d’un jardin suffisant à la production « d’aliments à haute valeur nutritionnelle. »
Exemple à suivre d’urgence.

Content image
x
45-FaimCachee-pauvrete-sante
Un environnement obésogène. Les bouleversements climatiques et les phénomènes de mode favorisent le recours à l’alimentation industrielle dans les pays les plus pauvres.
Rubriques
Santé Société