La Chine fait trembler la planète recyclage
Coup de tonnerre dans le monde du recyclage : la Chine, le plus gros importateur mondial de déchets, interdit, en 2018, l’importation de 24 types de déchets sur son
territoire. Cette décision a eu des répercussions planétaires. La Suisse aussi est touchée.
Le recyclage du plastique peut générer une pollution de l’air très élevée, dont la population chinoise est la première victime, notamment dans les villes. Les autorités chinoises se sont engagées à réduire la quantité de particules fines dans l’atmosphère d’ici à 2035. Pour protéger sa population, la Chine a donc décidé d’interdire l’importation des bouteilles en PET et autres films plastiques qui arrivaient d’Europe et des États-Unis par cargos. Les papiers non triés, certains matériaux textiles et les déchets provenant de la fabrication du fer ou de l’acier ont aussi été placés sur liste noire. Depuis la décision chinoise, les exportations américaines de déchets plastiques vers la Chine ont chuté de 92% selon le Bureau international du recyclage (BIR) à Bruxelles. Pour Arnaud Brunet, directeur du BIR, ces mutations profondes et à long terme des politiques d’importation de déchets du gouvernement chinois ont eu un impact mondial et ont déstabilisé le secteur.
Développement de réseaux illégaux
Des tonnes de déchets se sont accumulées en Californie, au Royaume-Uni, en Australie et ailleurs, alors que les pays exportateurs parcouraient le monde à la recherche de nouveaux acheteurs. Dans toute l’Asie du Sud-Est, les recycleurs opérant en Indonésie, en Thaïlande, au Vietnam et en Malaisie en ont acheté, mais ont rapidement été dépassés par le volume considérable que la Chine absorbait jusqu’en 2018. Des réseaux illégaux se sont développés dans de nombreuses régions du monde. En Asie du Sud-Est, la Malaisie a été la plus affectée. Le pays, qui compte une importante minorité chinoise, est devenu une destination de choix pour les industriels cherchant à déménager leur activité de Chine. Résultat : les importations de plastique du pays ont triplé depuis 2016 pour atteindre 870’000 tonnes en 2018, selon les données officielles. Conséquence, Yeo Bee Yin, ministre malaisienne de l’Énergie, de l’Environnement et des Sciences, a exhorté en juin de cette année les pays développés à ne plus expédier leurs déchets vers la Malaisie. Cette dernière n’autorise plus que l’importation de déchets plastiques propres et homogènes.
La Suisse, troisième producteur de déchets au niveau mondial
Pour Élisabeth Maret, chargée de l’information à l’Office fédéral de l’environnement (OFEV), la décision chinoise touche peu la Suisse qui fait déjà un grand travail de recyclage à la source : « Les déchets plastiques qui ne contiennent pas de substances dangereuses ou qui ne sont pas contaminés par d’autres déchets peuvent être exportés pour être recyclés sans autorisation de l’OFEV. Le traite-ment des déchets plastiques suisses est couvert par les usines d’incinération suisses et par les collectes séparées. L’interdiction d’importation de certains déchets plastiques ne présente pas de problème pour l’élimination des déchets suisses. » Il n’en demeure pas moins que l’économie privée suisse exporte toujours des déchets plastiques en Chine (voir encadré).
Quant à Mathias Schlegel, porte-parole climat et énergie de Greenpeace, il précise que la population suisse, avec environ 720 kg par an et par personne, est le troisième producteur mondial de déchets derrière les États-Unis et le Danemark. Il propose des pistes pour sortir de la crise du plastique et des déchets au niveau mondial : « Il faut agir sur trois plans : éviter le gaspillage et les objets de peu d’utilité, sortir de la culture du jetable et généraliser le recours à des solutions réutilisables. »
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