Le nouveau défi de Bertrand Piccard
Après l’aventure réussie de Solar Impulse, l’aéronaute suisse lance l’Alliance mondiale pour les solutions efficientes. Sa mission ? Présenter 1000 solutions écologiques et rentables aux décideurs de la planète lors de la COP24 qui se tiendra en décembre 2018.
Il martèle cette idée à longueur de conférence : la transition énergétique permettra de renouer avec la croissance. Réconcilier économie et écologie n’est donc plus une utopie pour Bertrand Piccard, mais plutôt la clé pour convaincre ceux qui gouvernent. De cette conviction est née l’Alliance mondiale pour les solutions efficientes : « Ces solutions propres sont rentables car elles créent des emplois, de la croissance et permettent de faire gagner de l’argent à ceux qui les produisent, précise l’initiateur et président de la Fondation Solar Impulse. Pourquoi ? Parce que le remplacement des vieux systèmes démodés et polluants par de nouvelles technologies efficientes et propres représente un gigantesque marché industriel. » Et d’ajouter : « Il faut favoriser l’efficience énergétique autant que les énergies renouvelables : motricité électrique, isolation des bâtiments, remplacement des ampoules par des modèles LED et les chauffages anciens par des pompes à chaleur, mettre en place des processus industriels modernes et généraliser les smart grids (réseaux de distribution d’électricité). Imaginez tout ce que cela représente comme économies d’énergie, mais aussi comme réduction de pollution et donc de facture pour la santé publique ! »
Évaluation indépendante
Pour parvenir à faire évoluer les mentalités, Bertrand Piccard prône notamment l’élaboration d’un cadre légal. En d’autres termes, il faut contraindre les entreprises et les acteurs publics à opérer cette transition majeure en instaurant, par exemple, des mesures semblables à la taxe carbone. Tout en montrant de manière très concrète ce qui peut déjà être réalisé, c’est la mission de cette Alliance mondiale réunissant des start-up, des entreprises, des particuliers et des institutions, capables de fournir 1000 solutions pour protéger l’environnement de façon rentable. Lors du lancement officiel en novembre dernier, on dénombrait déjà plus de 470 membres et 500 solutions potentielles. Ces dernières vont des usines de désalinisation solaires aux conteneurs dédiés à la transformation des déchets organiques en énergie, en passant par les filtres à air qui captent les émissions de CO2 pour les transformer en carburant renouvelable. Sans oublier des dispositifs à hydrogène permettant d’augmenter l’efficience énergétique des voitures électriques. D’ici à décembre 2018, lors de la présentation à la COP24 dans la ville polonaise de Katowice, toutes les solutions seront évaluées par des experts scientifiques et financiers indépendants selon une méthodologie destinée à estimer leur déployabilité, leur durabilité et leur viabilité.
Les énergies fossiles ont des coûts cachés, alors que les énergies propres ont des gains cachés.
Soutien planétaire
Du côté des institutionnels ayant rejoint cette nouvelle aventure planétaire, on citera la Ville de Paris, l’Union pour la Méditerranée, la Commission européenne et le Groupe ministériel sur l’énergie propre. Quant au financement, il est assuré par des partenaires privés (Nestlé, Engie, Air Liquide et BNP Paribas Suisse, notamment). Conscient de l’engouement suscité par son désir de rapprocher économie et écologie, Bertrand Piccard n’en reste pas moins conscient du chemin à parcourir. D’autant que dans son propre pays, la Suisse, il constate que l’on n’en fait pas assez en matière de développement durable : « On confond trop souvent la protection du paysage, en faisant des recours contre de nouvelles télécabines dans les stations de ski, avec la lutte contre les changements climatiques qui représentent un problème encore plus préoccupant que ce que l’on croit. Par ailleurs, il reste encore beaucoup trop de résistances de la part des milieux économiques qui n’ont pas compris que les technologies propres sont aujourd’hui rentables. Les énergies fossiles ont des coûts cachés, alors que les énergies propres ont des gains cachés. C’est pour cela que des solutions existent. » Le principal défi pour l’aéronaute suisse sera de parvenir à convaincre les gouvernements d’appliquer ces solutions dans les plus brefs délais. Avec comme finalité avouée de ne pas rester au stade des bonnes intentions afin d’intervenir de manière concertée et donc mondiale en faveur du climat. Car la majorité des scientifiques est catégorique : il est devenu urgent de changer de cap. Agir plus tard, c’est agir trop tard. Et ce sont tous les citoyens qui sont appelés au chevet de la planète.
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