Aux Pays-Bas, les maisons flottantes répondent aux menaces naturelles

Les premières maisons flottantes ont vu le jour en 2005 à Maasbommel, dans le nord des Pays-Bas, un village au bord de la Meuse. Construites en bois, fixées à des piliers métalliques, elles reposent sur une dalle en béton creux. Après les péniches amarrées au bord des canaux des principales villes, ce sont maintenant de véritables maisons dont les fondations peuvent flotter lorsque le niveau des eaux augmente. Elles restent connectées au réseau électrique et aux égouts grâce à la flexibilité de leur système de tuyauteries. « Je pense que depuis des siècles, les Pays-Bas ont été les leaders mondiaux dans la lutte contre la montée des eaux, affirme l’architecte Koen Olthuis, il était normal d’utiliser l’histoire des maisons-bateaux pour évoluer vers de nouvelles solutions. »

Il nous faut revenir un peu en arrière pour bien comprendre ce qui se joue derrière cet engouement pour les habitations flottantes. Les Pays-Bas sont depuis toujours dans une relation passionnée avec l’élément eau. Depuis toujours, l’une de leurs principales préoccupations est de se défendre de la mer, de délimiter des zones, d’assécher, de créer des digues, de surveiller, d’entretenir ces frontières artificielles. Le 31 janvier 1953, le jour de l’anniversaire de la princesse Beatrix, 500 km de digues ont cédé créant une inondation catastrophique, emportant avec elle 1 800 Néerlandais et laissant sans abri des milliers d’autres. En retrouvant les archives de radio de ce jour terrible, on entend des mots comme misère, horreur, épouvante, visions de mort. On comprend qu’ici, aux Pays-Bas, il existe un avant et un après 1953.

Créer une architecture verte et bleue pour vivre sur l’eau

Le Waterstudio, emmené par Koen Olthuis, 44 ans, révolutionne le marché de l’habitat flottant, en proposant des constructions vertes et socialement conscientes. « Les architectes peuvent utiliser leur influence et leur créativité pour apporter le changement à des millions plutôt qu’à quelques-uns », explique le visionnaire. Dans le pays aux 3 500 polders, le projet Citadel s’inscrit comme la première construction européenne d’appartements sur l’eau, se dotant même d’un parking, grâce à une solide fondation flottante en béton. L’immeuble sera entouré de serres et le toit surplombé de 50 terrasses légères, entièrement végétalisées, participant activement au contrôle de son isolation. Au total, la consommation d’énergie est 25 % moins élevée que celle d’un même ensemble sur terre. Ce programme référence de 1 200 habitations est prévu dans la commune de Westland, sur une zone dépolarisée et pourrait intéresser, à l’échelle mondiale, toutes les villes concernées par la  montée des eaux, qu’elles soient riches ou pauvres. « Ce n’est pas l’architecture mais la durabilité, la technologie et la densité qui ouvrent de nouvelles possibilités », affirme l’équipe du Waterstudio. Dans une dizaine de communes du pays, des maisons, des villas et des îles flottantes aménagées existent déjà. « Tous les projets que j’entreprends doivent contribuer à un concept de ville plus performante », explique Koen Olthuis : en 2007, le magazine Time le classait parmi sa sélection des 100 personnalités les plus influentes. Depuis, ses projets d’architecture verte séduisent bien au-delà des frontières néerlandaises. « Pour moi, les designers d’aujourd’hui s’inscrivent dans la génération du changement climatique en améliorant principalement leur point de vue sur les éléments urbains, qui doivent passer de statiques à dynamiques. »