La Terre est bleue comme une économie circulaire
Il est le promoteur du premier tissu d’ameublement 100% recyclable utilisé aujourd’hui pour les sièges des Airbus A380. Albin Kälin, fondateur et PDG d’EPEA Switzerland GmbH, exhorte l’industrie mondiale à emprunter le chemin de l’économie circulaire en adoptant la méthode Cradle to Cradle®.
Quelle est la mission d’EPEA Switzerland et de sa certification C2C ?
Albin Kälin : Nous nous définissons comme des partenaires de l’industrie. Nous coachons et aidons des entreprises à développer des concepts innovants, selon le modèle Cradle to Cradle qui certifie la recyclabilité à 100% d’un objet ou d’un composant. EPEA Switzerland, acronyme d’« Encouragement de l’agence de protection de l’environnement », compte 18 personnes toutes issues de l’industrie. La partie analyse est confiée à EPEA Hambourg qui rassemble des biologistes, des chimistes et des ingénieurs de l’environnement. Pour plus d’objectivité, notre entité Slovène attribue les certifications C2C (ndlr : bronze, argent ou or). Aujourd’hui, environ 6’000 produits ont reçu le label dont une centaine en Suisse. Nous n’avons pas vocation à toucher aux produits existants de nos clients ; nous les aidons à en élaborer de nouveaux dont la qualité des matières premières sera maintenue au travers de plusieurs cycles de vie et le cas échéant leurs déchets transformés en nutriments pour la biosphère. C’est le principe du déchets = nourriture.
Ces nouveautés pourraient dans un second temps s’appliquer aux produits existants…
Absolument. Ces nouvelles valeurs vont pouvoir s’appliquer finalement dans toute l’entreprise. Tout l’enjeu est de trouver un chemin économique viable dans ce nouveau contexte. Mais si ce défi complexe est relevé alors il sera applicable dans de nombreux autres domaines. Avec la marque Wolford par exemple, après cinq ans de développement et de recherche sur les matériaux, les produits chimiques, les colorants, nous sommes arrivés à créer un produit de luxe entière-ment recyclable et compostable. Le résultat que nous avons atteint est inégalé dans le monde.
Pourquoi une entreprise décide-t-elle de vous suivre ?
Le but est de créer quelque chose de nouveau, de meilleur. Cela peut leur donner de réelles opportunités économiques… Mais souvent le désir d’un changement vient d’un entrepreneur ou d’un manager qui s’est senti concerné personnellement et responsable du bien-être des générations à venir. Si les consommateurs les encouragent aussi à prendre cette voie, on peut compter désormais sur la montée des exigences de l’Union européenne. Cela devrait nous donner un peu plus de poids.
Cette conscience écologique prend-elle de l’ampleur au fil des années ?
Non, pas vraiment… pas assez. En Suisse, nous sommes les champions du monde du recyclage des PET et de l’incinération. Les personnes qui voudraient faire bouger les lignes doivent avoir un fort pouvoir de décision dans leur entreprise et beaucoup de conditions doivent être réunies, comme avoir une équipe à l’écoute. Mais, aujourd’hui, la question n’est plus d’agir, mais de réagir. La Suisse doit se décider à prendre le train qui est en marche.