Les petits Anglais, futurs génies 2.0

En Angleterre et au Pays de Galles, les enfants sont désormais initiés à la programmation informatique dès leur entrée à l’école. Le Royaume-Uni entend révolutionner l’enseignement du numérique.

Nic Hughes enseigne les algorithmes à des élèves âgés de 7 à 9 ans. Un véritable jeu d’enfant, selon lui. « Un algorithme est une série d’instructions qui doivent être appliquées dans un certain ordre », explique du tac au tac ce professeur des écoles. Derrière l’enthousiasme évident de cet enseignant pour l’informatique se cache un intérêt personnel pour la « mécanique des ordinateurs ». Mais cet instituteur londonien n’est pas un enseignant particulièrement zélé. Il ne fait qu’appliquer le programme introduit en septembre 2014.

Auparavant, comme ses collègues responsables de l’enseignement de cette matière au primaire, Nic Hughes était chargé de former les élèves à l’utilisation des logiciels Microsoft. Il les initiait aussi à l’usage sans danger d’Internet. Il y a deux ans et demi, le gouvernement de David Cameron a relevé la barre : désormais, dès l’âge de 5 ans, les enfants doivent apprendre les bases de la programmation informatique.

Pendant un trimestre par an, Nic Hughes consacre environ une heure hebdomadaire de cours à cette matière. Selon cet enseignant de Latymer Prep School, une école privée de l’ouest londonien, les élèves ont très bien accueilli cette nouveauté. « Généralement, ils se montrent très intéressés par la programmation. C’est une matière interactive qui leur permet de résoudre des problèmes », ajoute M. Hughes.

Autre école, autre quartier de la capitale, même constat. « La programmation informatique est une autre façon d’apprendre. Les enfants adorent ça, dès le plus jeune âge », assure Dinha Williams, enseignante à Shacklewell Primary School à Hackney. Dans cette école publique de l’est de Londres, les élèves ont l’opportunité de mettre en pratique les principes de base de la programmation informatique appris en classe. Sous la supervision de parents bénévoles, dans les locaux de l’école, une vingtaine d’enfants participent une fois par semaine à Code Club.

Le club de Shacklewell Primary School est l’un des 5000 Code Clubs du Royaume-Uni. Créée en 2012 au Royaume-Uni, l’association a pour mission de faire l’éducation numérique de toute une génération. « Le but est d’offrir aux enfants de 9 à 11 ans la possibilité de développer leurs compétences en programmation informatique, en parallèle de ce qu’ils apprennent dans le cadre du programme scolaire », résume Emma Norton, l’une des responsables de Code Club. L’atmosphère est moins formelle que celle d’une salle de classe. La participation à cette activité du soir est gratuite.

Le logiciel en ligne, baptisé Scratch, initie les enfants aux concepts fondamentaux de la programmation.

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Fleur, 9 ans, se montre très assidue. Cette petite fille estime que « Code Club est un bon moyen de comprendre le fonctionnement des jeux vidéo ». Pour cela, nul besoin de maîtriser HTML, CSS ou un quelconque langage informatique élaboré. Le logiciel en ligne qu’utilisent les enfants, baptisé Scratch, les initie aux concepts fondamentaux de la programmation grâce à un système de blocs de couleurs. Pour animer des personnages sur leur écran d’ordinateur, les enfants sélectionnent et empilent ces blocs virtuels. Parmi ces apprentis programmateurs, combien seront-ils dans dix ans à s’orienter vers l’informatique ? Actuellement, Apple, Google et les autres entreprises du secteur numérique installées au Royaume-Uni ont du mal à recruter la main-d’oeuvre dont elles ont besoin. C’est pour cette raison qu’un programme informatique plus ambitieux a été introduit par l’ex-gouvernement Cameron en 2014. Mais les autorités n’ont elles pas placé la barre trop haut ? Une étude publiée en décembre dernier montre que, pour l’instant, les lycéens qui choisissent l’informatique comme matière au brevet et au baccalauréat sont rares et principalement issus de milieux sociaux privilégiés. Certains professeurs estiment que les exigences requises sont trop importantes, d’autant que les enseignants n’ont souvent pas été formés au nouveau programme. La révolution informatique attendra encore quelques années.

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