L’art urbain, allons plus loin
L’art a pris une place incontestable dans l’espace public urbain. Certes, les formes de cette présence peuvent parfois surprendre, choquer, ou pire laisser indifférent : « Ah bon, c’est de l’art ce truc-là ? » Rappelons qu’une municipalité européenne vient de faire effacer à grands frais un énorme tag… avant de s’apercevoir qu’il s’agissait de la précieuse réalisation qu’elle avait elle-même commandée à un artiste !
Dans ce numéro, nous avons donc souhaité nous évader des préoccupations immobilières pour survoler la création artistique dans les bâtiments publics, les rues et les parcs genevois et vaudois, mais aussi sous d’autres cieux. Nous nous sommes intéressés aux oeuvres visibles de tous. Notre constat, forcément subjectif, en ce qui concerne la Suisse romande, est celui d’un certain éparpillement, d’une sorte de dispersion des moyens et des efforts pourtant méritoires consentis par les autorités, avec ou sans l’appui de mécènes privés. Un fil rouge, une logique paraissent faire défaut, alors que les budgets investis et le nombre d’artistes sollicités sont imposants. Une question se pose : l’identité des interventions artistiques est-elle plus perceptible par le grand public, moins diluée, en cas de manifestations ponctuelles et limitées dans le temps telles que Geneva Lux ? Ou alors la formule d’un partenariat public-privé équilibré et bien délimité favorise-t-elle cette prise de conscience en offrant les outils « marketing » de sa valorisation ?
Une sorte de dispersion des moyens et des efforts pourtant méritoires consentis par les autorités, avec ou sans l’appui de mécènes privés.
Autre réflexion : ne serait-il pas temps, dans notre région, de disposer d’une application numérique proposant des balades centrées sur les oeuvres d’art placées dans l’espace public ? Aujourd’hui, les pays les plus exotiques disposent de wi-fi public et d’applications touristiques, mais pas nous. Qu’en pensent nos responsables politiques, culturels et ceux de nos offices de tourisme ?
En jetant un oeil sur la situation d’autres pays, nous avons été étonnés d’y trouver de véritables éruptions de créativité, en des lieux imprévus : mentionnons les « Stazioni dell’arte » de Naples, qui ont mis en synergie de grands architectes et des artistes de renommée internationale, à tel point qu’une des stations du métro napolitain (Toledo) a été désignée par CNN et le Daily Telegraph comme la plus belle d’Europe ! Vous verrez également que l’art public peut aussi être un instrument de revitalisation urbaine, par exemple à Singapour. Ou qu’il peut porter un message social avec l’ours de glace de Mark Coreth ou les quelque trois cents réservoirs caractéristiques de New York City, peints par des artistes illustrant le caractère vital de l’eau.
Enfin, si ce coup de projecteur sur l’art devait inspirer certains de nos lecteurs, porteurs d’un projet mais ne sachant comment le concrétiser, l’existence des Nouveaux Commanditaires (p. 31) mérite leur attention.
Edito