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Interview de Pierre Maudet

Le conseiller d’État en charge de l’Économie, Pierre Maudet, a ouvert le Smart City Day qui a eu lieu le 14 septembre 2017 à Genève. Il croit fermement aux opportunités économiques de la transition numérique.

Le Smart Canton vise à agir en qualité de levier économique.

– Le concept de Smart City mise sur une sorte de ville idéale, verte, connectée, propre, efficace, agréable à vivre. Vous êtes en charge de l’Économie dans le canton-ville de Genève : en quoi l’économie genevoise peut-elle contribuer à cet idéal ?

Pierre Maudet – Le Canton de Genève a pleinement pris conscience du formidable défi auquel la transition numérique nous confronte, et a inscrit dans sa Stratégie économique cantonale 2030 l’objectif consistant à mettre en place un Smart Canton à l’échelle du territoire genevois. Ce projet a démarré en juin 2016 et prévoit de remettre au Conseil d’État genevois un rapport valant plan directeur en mars 2018.

– Avec quelles ambitions ?

– Doter le territoire genevois d’une double infrastructure. D’une part, une infrastructure physique sur laquelle se grefferont des projets exploitant la technologie de l’Internet des objets (Internet of Things, ou IoT, représente l’univers des objets connectés qui génèrent des données : cafetière, voiture, montre, etc., ndlr) et, d’autre part, une infrastructure logicielle, par le biais d’une plateforme de mise à disposition de données. Cette dernière permettra aux acteurs économiques genevois d’utiliser les données précitées pour mener des projets innovants, par exemple dans le domaine de la mobilité électrique, de l’offre commerciale d’un quartier ou de la propreté du domaine public. Ils pourront bien entendu également contribuer à l’augmentation du volume de données présentes sur la plateforme, en acceptant de mettre à disposition leurs propres données. En cela, le Smart Canton vise à améliorer le bien-être de la population et à agir en qualité de levier économique.

– Dans le vocabulaire Smart City, on parle beaucoup d’économie sociale, solidaire, qui agirait dans la proximité et serait orientée vers l’innovation. Les entreprises plus traditionnelles ont-elles aussi un rôle à jouer dans le processus Smart City, et si oui lequel ?

– Dès l’instant où la transition numérique touche à tous les domaines d’activités et à l’ensemble des modèles d’affaires, les entreprises traditionnelles sont concernées au même titre que celles qui revendiqueraient un statut plus disruptif. Chaque branche d’activité doit dès à présent s’interroger sur les opportunités et impacts de cette évolution sur sa propre activité et se préparer à la révolution qui s’annonce.

– Quelques exemples ?

– Certaines entreprises du bâtiment ou de l’immobilier ont déjà commencé à œuvrer dans ce sens, en faisant preuve de solutions innovantes que ce soit en termes de techniques constructives, de performance énergétique ou de domotique. Par ailleurs, en leur qualité de porteurs de projets ou de prestataires de services, elles vont jouer un rôle actif dans l’utilisation et la valorisation des données, publiques ou privées, qui seront exploitées par le Smart Canton. Elles s’attacheront ainsi à répondre aux attentes de la population et, partant, contribueront au développement économique de la région.

– Smart City, ce sont des villes qui se mettent en réseau, partagent entre elles des expériences pour tendre à une forme d’autonomie par rapport à des cadres politiques et territoriaux traditionnels. En d’autres termes, Smart City dépasse les institutions cantonales, départementales ou nationales. Ces dernières doivent-elles redouter le projet Smart City ?

– Penser cette évolution en termes d’antagonisme serait un non-sens. La technologie de l’IoT et la valorisation des données qu’elle suppose ne peut exister que dans la mesure où les acteurs de ce canton et de ce pays raisonnent en termes de collaboration, d’échanges, de mutualisation et d’interopérabilité des systèmes comme des technologies. D’ailleurs, le projet Smart Canton se construit actuellement avec les représentants de l’ensemble des acteurs genevois : administrations cantonale et communales, monde académique, entreprises, population. Et en collaboration active avec des métropoles suisses ou européennes œuvrant avec le même état d’esprit dans le cadre de projets smart incluant les IoT.

– Quelle est la ville modèle qui, aujourd’hui et selon vous, dans le monde, semble s’approcher le plus d’une Smart City ?

– S’il y a quelques principes incontournables à respecter pour réussir la mise en place d’un écosystème du type Smart Canton, chaque territoire est particulier et il lui revient de se doter du système et de l’organisation qui lui siéent le mieux. Cela dit, certaines métropoles comme Copenhague ou Manchester – avec lesquelles nous collaborons – sont au bénéfice d’une expérience de plusieurs années dans le domaine des Smart Cities. Au niveau du territoire genevois, la Ville de Carouge a su développer des projets innovants qui lui permettent de participer à H2020, le programme européen pour la recherche et le développement pour la période 2014–2020.

Rubriques
Innovation Urbanisme