Interview de Charles Kleiber

Ne pas accumuler les charges pesant sur la jeunesse.

Charles Kleiber, Ancien secrétaire d’Etat à l’éducation et à la recherche

1. Pensez-vous que la qualité de l’enseignement, notamment universitaire, soit toujours excellente en Suisse ?

En comparaison internationale, sans aucun doute. Deux éléments l’attestent : la remontée de la Suisse dans le classement PISA, qui montre que nous sommes capables de tirer les leçons de nos erreurs, et la place de choix de nos universités dans tous les rankings internationaux, qu’il s’agisse de formation ou de recherche. Nous avons le meilleur indice mondial d’impact des publications de recherche par habitant. Le pourcentage d’étudiants étrangers (20 %), de professeurs étrangers (30 %) et de post-doctorants étrangers (55 %) est éloquent. Cela témoigne d’une forte demande étrangère qui est un des meilleurs signes de la vitalité de notre place universitaire. A Zurich, il y a par exemple tant de professeurs et d’étudiants allemands qu’il va falloir trouver des solutions pragmatiques pour conserver un certain équilibre.

2. Quel est le poids du « label suisse » à l’étranger, en matière d’études ? Est-il reconnu à sa juste valeur ?

Le poids de ce label est directement lié à l’image de la Suisse ; il est donc très reconnu.

3. Les taxes universitaires suisses ou les écolages d’institutions de formation sont-ils suffisamment élevés, en comparaison internationale ?

J’ai la conviction que les jeunes d’aujourd’hui font de plus en plus figure de génération sacrifiée. Leurs aînés ont bénéficié du plein emploi et s’apprêtent à jouir de leur retraite et de leur épargne. Eux, ils doivent se battre pour étudier, pour se loger, pour trouver un emploi. Il faut éviter d’accumuler les charges pesant sur la jeunesse. Le modèle britannique, qui endette fortement les étudiants, me paraît inacceptable. Si une augmentation des taxes est négociable, ce sera, à mon sens, uniquement dans la perspective d’un système fédéral de bourse qui renforcera l’égalité de chances qui s’effrite depuis quelque – temps et est insuffisante. Chacun doit pouvoir étudier s’il
en a les compétences, quel que soit le statut social de sa famille : c’est cela la société de la connaissance.

4. Les pouvoirs publics fédéraux et cantonaux en font-ils assez pour promouvoir l’excellence de la formation helvétique à l’étranger ?

Bien sûr que non. Si l’objectif est de conserver notre rang dans la société de la connaissance, il faut investir dans des bourses d’études et des financements généreux, favorisant une réelle égalité des chances.

5. Quels sont les avantages et les défauts d’une formation en Suisse, pour un étranger ?

Il y a beaucoup d’avantages, démontrés par les faits, à choisir la Suisse pour y effectuer ses études ou une partie de celles-ci. La qualité de vie, celle des formations dispensées, la situation géographique et l’ouverture internationale du pays… La Suisse académique est très forte, et c’est aussi l’héritière d’une longue histoire, d’une tradition d’excellence. Du côté des défauts, mentionnons le fait que toutes les filières et formations ne sont pas représentées ; mais c’est le cas dans la plupart des petits pays ou des villes.

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