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À Carouge, échanger pour mieux avancer

Que ce soit au travers d’associations internationales ou de plateformes suisses, la collaboration apparaît comme la solution la plus efficace pour faire avancer la thématique Smart City. Un partage de connaissances qui permet à la Suisse de rattraper son retard dans le domaine.

Le principe consiste à s’ouvrir au monde pour avoir des idées et les réaliser ensuite grâce à des entreprises locales.

« La Suisse a pris du retard dans le domaine du Smart City ! » Tel est le constat de Laurent Horvath, délégué Smart City de la ville de Carouge. Avant d’adoucir ses propos : « Ce retard est devenu une chance finalement, puisque cela nous a permis d’éviter de faire des erreurs, de gaspiller de l’argent et nous permet désormais de bénéficier de technologies efficaces. » Aujourd’hui, la Suisse compte aller de l’avant et s’entoure des meilleurs pour y parvenir.

Que ce soit sur le plan national ou international, le partage d’informations apparaît de plus en plus comme le moyen le plus efficace pour y parvenir. Genève et Carouge en sont peut-être les premières conscientes, puisque les deux villes ont rejoint le 6 juin dernier l’Open and Agile Smart Cities (OASC). Cette association internationale, créée en 2015, regroupe plus de cent villes du monde entier impliquées dans le développement du Smart City et vise à favoriser le partage d’expériences et de données entre les différents représentants de ces cités membres. « Le but de ce regroupement est de permettre un contact direct, afin d’échanger sur nos démarches, explique Nicolas Walder, conseiller administratif de Carouge. On partage en toute transparence sur nos expériences, ce qui a fonctionné ou non, permettant ainsi de gagner du temps dans la réalisation de nos projets. »

Suite logique

Pour l’heure, Carouge et Genève sont les seules villes en Suisse à faire partie de l’OASC. Leur adhésion a ainsi permis à notre pays d’être représenté dans l’association. Pourtant, la présence de Carouge dans l’organisation pourrait surprendre. Avec ses quelque 22 000 habitants, la cité sarde ne fait pas partie des villes majeures pour représenter la Suisse dans l’OASC. Au sein de la commune, la démarche fait pourtant sens. Depuis plusieurs années, celle-ci montre en effet un intérêt marqué pour la question du Smart City. Déjà membre du projet SynchoniCity au sein du programme européen H2020 – dont le but est de développer un réseau avec les grandes villes européennes actives dans le domaine –, Carouge a mis en place deux projets pilotes visant à utiliser les nouvelles technologies pour optimiser l’utilisation des ressources naturelles. Le premier cherche à développer une gestion intelligente du stationnement grâce à l’installation de capteurs permettant de réduire le temps nécessaire à la recherche de place de parking et les nuisances qui en découlent. Le second propose une analyse 3D du bruit, afin de mieux lutter contre ce problème. « C’est aussi le rôle des villes de moyenne importance de servir de déclencheur dans un domaine que l’on estime porteur, constate Nicolas Walder. C’est sans doute plus facile d’y parvenir pour des communes de notre taille, car les décisions se prennent plus rapidement que dans des grosses villes comme Zurich. »

De l’international au local

Grâce à l’OASC, Carouge dispose désormais d’un réseau important auprès des métropoles européennes les plus avancées dans le domaine. « Quand on se lance dans le Smart City, on est souvent contacté par des entreprises qui cherchent à nous vendre des systèmes, sans que ceux-ci soient forcément efficaces ou adaptés à notre situation, souligne Laurent Horvath. À travers l’OASC, on bénéficie de l’expérience des autres villes. Grâce à un contact direct avec leurs dirigeants, il existe un échange en toute transparence sur nos expériences, cela permet un gain de temps important. » Et Nicolas Walder d’ajouter : « Cela nous évite de réinventer la roue chacun de son côté ! » Si l’échange international se trouve à la base de la démarche, une approche plus régionale prend ensuite le relais. « Au final, le principe consiste à s’ouvrir au monde pour avoir des idées et les réaliser ensuite grâce à des entreprises locales, indique Laurent Horvath. Car ce sont elles qui sont le plus à même de comprendre et de s’adapter à notre problématique et d’intervenir en cas de souci. »

Plateforme suisse

Après Genève et Carouge, d’autres grandes villes telles que Lausanne, Zurich ou Bâle espèrent également rejoindre l’OASC prochainement. Il faut dire que le nombre  de projets Smart City ne cesse de croître dans tout le pays. Consciente de l’enjeu, la Confédération, à travers l’Office fédéral de l’énergie, a développé la plateforme Smart City Suisse, visant à favoriser la mise en réseau et les échanges entre les différents acteurs impliqués dans la démarche. À ce jour, cette base de données regroupe plus de cent projets en Suisse. « Ils sont d’ordres très différents, relève Matthieu Chenal, chargé de communication à SuisseÉnergie pour les communes – un programme de l’Office fédéral de l’énergie. Cela peut être des recherches au niveau académique ou alors de véritables mises en pratique. Depuis 2010, on constate une forte émulation autour de la thématique. Celle-ci est séduisante parce qu’elle implique une idéologie qui fait rêver : une meilleure utilisation des ressources, sans perdre du confort et en optimisant les technologies les plus avancées. »

Intérêt hors des frontières

Certains projets s’avèrent prometteurs. La ville de Porrentruy, par exemple, a mis en place un système d’analyse de ses fluides, permettant de disposer en permanence et en temps réel de données sur sa consommation d’eau, d’électricité et de chauffage. Ce projet, unique en Suisse, permettra à la ville jurassienne de réaliser des économies substantielles.

Pully, quant à elle, a développé en partenariat avec Swisscom un projet dans le but est de créer un observatoire de la mobilité. Grâce aux données récoltées sur les téléphones des utilisateurs de l’opérateur, le flux de pendulaires qui entrent, sortent, traversent ou circulent dans la ville est analysé. « La Suisse reste encore un acteur modeste dans le domaine, en termes de présence et d’impact, relativise toutefois Matthieu Chenal. Lorsque l’on parle de Smart City, on pense tout de suite aux mégapoles du monde entier. » Mais que ce soit grâce à la collaboration internationale ou par ses instituts de recherche, ses écoles et universités, le pays se profile peu à peu sur cette thématique. Les concepteurs et promoteurs du projet de Pully ont par exemple été invités à plusieurs reprises à présenter leurs résultats lors de congrès européens. « Cela prouve que certains de nos projets intéressent au-delà des frontières », conclut Matthieu Chenal.

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Innovation Urbanisme