Saint-Georges Center, la plus haute grue de Genève
La construction du Saint-Georges Center est lancée depuis l’automne 2010. Le chantier se donne à voir loin à la ronde avec la plus haute grue de Genève. Etat des lieux d’un projet rare en centre-ville.
« Nous n’avons pas à nous plaindre : l’historique de ce projet n’est pas un serpent de mer », souligne Dominique Bakis-Métoudi, directrice à la SOCIÉTÉ PRIVÉE DE GÉRANCE et pilote de ce projet rare à tous points de vue. En effet, bâtir un immeuble de bureaux neuf, en plein centre-ville de Genève, six ans après le lancement du concours et avec une mise en location effective en été 2012, cela n’arrive pas tous les jours. Retour sur un projet dont la façade à ogives jaune, orange et rouge abritera surtout un esprit très vert dans le quartier de Saint-Georges.
Bureau berlinois, relais genevois
En 2004, un appel à concours est lancé auprès de plusieurs bureaux d’architectes de renom pour réfléchir à l’avenir du 16-18 boulevard Saint-Georges. A l’époque, des services de l’Etat logent encore dans cet austère bâtiment. Alors que les architectes sollicités retravaillent la trame régulière de la façade d’origine, le bureau berlinois Sauerbruch Hutton Architects, lui, propose une nouvelle enveloppe arrondie. Et remporte le marché. Dans un premier temps, il est envisagé de ne rénover que la façade, quitte à scier les dalles de l’ancien bâtiment pour les adapter à l’enveloppe elliptique. Les autorisations de rénovation sont déposées. Mais parallèlement, l’idée de démolir et de reconstruire, plus rationnelle, fait son chemin. Une procédure en demande d’autorisation est aussi lancée dans ce sens et obtient l’accord des autorités. La SOCIÉTÉ PRIVÉE DE GÉRANCE en assume le pilotage de construction et la gestion. Propriété de la SI Saint-Georges Center SA, l’immeuble épouse le destin de son quartier, lui aussi en plein chantier avec le TCOB et le futur éco-quartier sur l’ancien site d’Artamis… Les travaux débutent à l’automne 2010 (voir l’article paru dans IMMORAMA no 27, Automne 2010), en association avec le bureau genevois Fabio Fossati – Architectes. « Lorsqu’un bureau étranger construit hors de son territoire, ce partenariat est indispensable, souligne Fabio Fossati. Autant dans la phase de préparation – demandes d’autorisation, appels à soumissions – que pour le suivi de chantier. »
Une architecture polychrome
Comme c’est le cas pour la plupart de leurs bâtiments (Musée Brandhorst à Munich en 2008, Agence fédérale de l’environnement à Dessau en 2005), Matthias Sauerbruch et Louisa Hutton ont travaillé sur une façade polychrome. Si le parti traduit un désir de marquer son territoire et d’offrir une expérience sensorielle aux usagers, y compris ceux de la rue, il est aussi hautement technologique. L’enveloppe fonctionne comme un outil de contrôle de l’environnement et tisse un lien serré avec lui : par un jeu d’ogives colorées de tailles variables, de fins stores sur les vitrages et un système sophistiqué de ventilation à double flux, les variations climatiques sont gérées différemment selon la saison ou l’exposition. Les ogives sont plus proéminentes sur la façade sud qu’au nord, et protègent donc mieux du soleil. Cette relation avec le dehors se lit ainsi dans la silhouette du bâtiment. Quant au plan, une ellipse très étroite s’est calée sur l’ancienne emprise rectangulaire du bâtiment initial. Résultat : des lignes fluides qui rappellent plus celles d’un voilier que d’un paquebot.
Vingt-cinq sondes géothermiques déjà posées
La métaphore du voilier convient d’ailleurs aussi lorsqu’il s’agit d’évoquer les caractéristiques énergétiques de cet immeuble au label MINERGIE®. Soit un bâtiment dont les charges se trouvent divisées par trois par rapport à un immeuble standard. Différentes mesures sont prises à cet effet, dont font partie les vingt-cinq sondes géothermiques qui viennent d’être plantées à 150 mètres de fond. Elles sont raccordées à une pompe à chaleur qui sera elle-même en relation avec des dalles actives, c’est-à-dire capables de stocker et de diffuser la chaleur puisée dans le sol. La climatisation est également assurée par les sondes géothermiques, par un système d’inversion des températures semblable à celui régulé par un compresseur dans nos réfrigérateurs. Des panneaux photovoltaïques pourront en outre être installés en toiture. Pour l’heure, le radier est terminé, et l’élévation des sept étages sur rez a commencé en ce début d’année 2011.
Mise en location réussie
L’un des objectifs du programme les plus épineux pour les architectes a été de concilier un immeuble à la fois parfaitement achevé et complètement modulable. « Une quadrature du cercle exigée par la nature de l’objet, commente François Delaite, responsable du département des locations commerciales à la SOCIÉTÉ PRIVÉE DE GÉRANCE. Nous voulions conserver toute liberté de louer soit à plusieurs preneurs soit à un seul, cela quelles que soient les activités. » Le plan prévoit ainsi une colonne centrale pour la desserte des plateaux et les locaux techniques. Entre ce noyau « dur » et la façade, il est possible d’aménager des bureaux individuels ou paysagers, soit 600 à 700 places de travail au total. Conséquence de la qualité du projet, et notons-le aussi, de la rareté de l’offre de surfaces de bureaux importantes en centre-ville, un locataire unique a vite été trouvé en la personne de l’Etat de Genève pour s’installer dans les 8 500 m2 que comptera, dès l’été 2012, le 16-18 Boulevard Saint-Georges. « L’Etat a pu louer l’immeuble parce qu’il a été le plus rapide à se décider parmi plusieurs repreneurs sérieux », explique François Delaite.
La plus grande grue de Genève
« Même si le label MINERGIE® est une obligation aujourd’hui, le caractère écologique du bâtiment est, sur le plan commercial, un atout majeur », souligne encore François Delaite. A peine ses fondations creusées (pour un parking de 58 places), le Saint-Georges Center fait déjà parler de lui loin à la ronde puisqu’il est doté de la plus grande grue du canton. « L’hôtel de police voisin est en effet surmonté d’une antenne de 30 mètres, explique Fabio Fossati. Ajoutez-les aux 40 mètres du bâtiment et vous comprenez pourquoi nous sommes dans l’obligation d’utiliser une grue de plus de 70 mètres pour travailler en toute sécurité. » Mais à n’en pas douter, même après la fin de la construction, on entendra encore parlé du Saint-Georges Center pour sa contribution notable au patrimoine bâti et à l’embellissement de la ville de Genève. Sans doute est-ce aussi grâce à un maître d’ouvrage qui s’est donné la peine d’organiser un concours d’architecture international et qui a su faire preuve de courage et de détermination.