Inde : Les études universitaires plébicitées et soutenues

Au panthéon des divinités hindoues, Saraswati, la déesse du savoir, est l’une des plus respectées. Reconnaissable à ses quatre bras, et au cygne blanc qu’elle chevauche, on la croise souvent dans les salles de classe, en compagnie du Mahatma Gandhi, et sur les autels que confectionnent de nombreuses familles à leur domicile.

Si elle est autant vénérée, c’est que le savoir et les diplômes représentent en Inde un ascenseur social et, dans beaucoup de cas, l’unique moyen de sortir de la pauvreté. Depuis le décollage économique de l’Inde et l’émergence d’une classe moyenne, le rêve de pouvoir entrer à l’université se rapproche lentement de la réalité pour de nombreux jeunes du pays. L’Inde, qui forme chaque année 14 millions d’étudiants et emploie près de 500 000 professeurs, a décidé de multiplier par dix son budget consacré à l’enseignement supérieur entre 2007 et 2012. Aujourd’hui, seuls 13 % des jeunes Indiens vont étudier à l’université, contre une moyenne de 23 % dans les pays développés. Un chiffre largement insuffisant. La concurrence est très rude pour entrer dans certains établissements prestigieux. Le taux d’admission à l’école qui forme les hauts fonctionnaires ne dépasse pas 0,1 % soit un admis pour 1 000 candidats. Et pourtant, contrairement à l’Europe, les jeunes diplômés manquent cruellement dans un pays qui connaît une très forte croissance. De l’ouvrier spécialisé à l’ingénieur en informatique, tous sont très demandés.

En Inde, les jeunes diplômés sont encore trop rares, et très courtisés.

L’Inde, qui ne consacre encore qu’un maigre 0,7 % de son PNB à l’enseignement supérieur, doit combler son retard. De l’aveu même du gouvernement indien, la qualité de l’enseignement supérieur en Inde est très hétérogène. « Alors que quelques instituts d’enseignement supérieur se placent bien au niveau mondial, le niveau standard est bien trop bas », estime le rapport du ministère indien de l’Education nationale publié en 2007. Mais améliorer la qualité de l’enseignement relève de la gageure, avec des professeurs qui préfèrent souvent les salaires proposés par le secteur privé. Les grandes entreprises informatiques, comme Infosys ou Wipro, se sont donc résignées à créer leurs campus pour former leurs jeunes recrues.

Le privé prend la relève

Pour répondre à la demande du secteur, de nombreux instituts privés se sont créés, dans les domaines du management et de l’informatique. Plus de la moitié des jeunes Indiens y poursuivent désormais leurs études, contre environ le tiers en 2001. D’autres choisissent de partir à l’étranger, en majorité vers les Etats-Unis ou l’Angleterre, où ils peuvent bénéficier de bourses, surtout pour effectuer un master ou une thèse de doctorat. 160 000 Indiens dépenseraient chaque année 4 milliards de dollars pour leurs études à l’étranger. Afin de retenir ces étudiants et améliorer son système universitaire, l’Inde a voté en 2010 une loi qui autorise les investissements étrangers dans ce secteur. Des universités comme celle d’Oxford, en Angleterre, pourraient bientôt ouvrir des antennes dans le pays. Mais encore faut-il avoir les moyens d’étudier à l’étranger ou dans les instituts privés, surtout dans un pays où les prêts aux étudiants sont quasi inexistants.

En théorie, l’université ne coûte pas cher en Inde et elle réserve un quota de places aux étudiants issus des castes intouchables ou défavorisées. Les frais d’inscription ne représentent que 5 % du coût de la scolarité. Mais pour les deux tiers des Indiens qui vivent loin des grandes villes et donc des universités, il faut ajouter les frais de logement et de nourriture. Or les bourses accordées aux étudiants sont encore modestes. Le ministère de l’Education nationale distribue chaque année 82 000 bourses qui se situent aux alentours de 15 euros par mois, sans jamais dépasser les 30 euros. Pour ceux qui n’ont pas les moyens d’aller à l’université, il reste encore la solution de l’enseignement à distance, très développé grâce à la forte diaspora indienne dispersée aux quatre coins du monde.

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