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La résurrection des églises suisses

Peu fréquentées et trop chères à entretenir, de plus en plus d’églises suisses sont vendues. Boîtes de nuit, galeries d’art ou garderies y élisent domicile.

Des bâtiments religieux changeant de fonction, le phénomène n’est pas nouveau. Pourtant, il s’est accéléré ces dernières années alors que les Suisses sont de moins en moins croyants. L’Office fédéral de la statistique publiait en janvier 2019 son dernier rapport sur le paysage religieux suisse. Entre 2010 et 2017, la part des catholiques romains et des réformés évangéliques a diminué au profit de celle des personnes sans appartenance religieuse, qui a progressé de 6 points entre ces dates. Conséquence : la baisse de fréquentation des églises.

Pour éviter leur destruction, certains de ces édifices sont vendus à des propriétaires leur offrant une seconde vie, car ils sont devenus trop chers à entretenir. Le site Internet de la Journée suisse du patrimoine religieux recense ces réhabilitations : ces 25 dernières années, près de 200 églises ont été transformées en Suisse.

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Les particuliers peuvent louer l’Elisabethenkirche
pour y héberger leurs événements. Ici, un défilé de mode.
Les particuliers peuvent louer l’Elisabethenkirche pour y héberger leurs événements. Ici, un défilé de mode.

Les églises modernes sont plus faciles à transformer

Considéré comme le spécialiste des reconversions d’églises, Johannes Stückelberger voit surtout du potentiel dans les églises modernes (construites après 1950) qui ne sont pas toujours des édifices protégés et dont l’architecture diffère des églises plus classiques : « Ces bâtiments permettent une polyvalence grâce à leur organisation spatiale, correspondant justement à la volonté actuelle d’organiser l’église en fonction des besoins », expliquait-il à l’agence de presse protestante Protestinfo.ch. Ainsi, l’église apostolique des Addoz à Boudry, construite en 1989, a été vendue pour 570’000 francs au Conseil général de cette commune. Depuis 2012, l’ancienne église accueille une garderie, créant une dizaine de places supplémentaires pour les enfants, selon les médias locaux. L’ancien monastère Saint-Josef à Soleure, quant à lui, a été transformé en galerie d’art moderne dans laquelle des artistes de renommée nationale et internationale présentent leurs œuvres. L’ancien monastère abrite aussi la Brasserie Saint-Jo où il est possible de goûter à la gastronomie locale tout en échangeant avec les artistes.

Des alternatives à la réaffectation

Répondre à de nouveaux besoins sans pour autant abandonner ses activités de lieu saint, c’est ce que l’Elisabethenkirche de Bâle, qui a failli être détruite il y a vingt-cinq ans, a fait en ouvrant ses portes à diverses manifestations : fêtes privées, défilés de mode, messes pour les animaux de compagnie, soirées disco… Elle n’a pas été désacralisée puisqu’elle accueille toujours des événements religieux. Frank Lorenz, l’un des deux dirigeants de L’« Offene Kirche Elisabethen » tient à le préciser, l’église n’est pas « réhabilitée », mais modernisée. Grâce à cela, le public qui fréquente l’église est plus nombreux mais aussi plus varié. « Située dans le centre-ville, notre église se trouve sur le chemin des employés, des touristes, des sans-abri et des réfugiés, des riches et des pauvres, de ceux qui cherchent de l’aide et de ceux qui cherchent le bonheur », décrit Frank Lorenz. Il affirme qu’au cours des cinq dernières années, le nombre de visiteurs moyen était de 100’000 par an. « Nous voulons transmettre nos expériences au sein des églises de Bâle, des églises cantonales environnantes et de leurs communautés », se félicite Frank Lorenz. L’église qu’il administre est devenue un modèle dans une époque où ces dernières peinent à attirer les fidèles.

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