Espèces d’espaces

Le designer Simon Husslein enseigne à la Haute école de design (HEAD) de Genève et tient cabinet à Zurich. Il a transformé pour quelques jours son atelier zurichois en parcours de démonstration. Une série d’installations qui explorent tous les liens entre espace et lumière.

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Simon Husslein sait faire vibrer toutes les cordes de son métier.

Le dispositif est inhabituel: ce n’est ni une exposition d’art contemporain, ni une performance off, ni une expérimentation. C’est un peu tout cela à la fois et cela se visite sur rendez-vous, à Zurich, jusqu’au dimanche 17 mars (https://husslein.net/register). C’est l’œuvre éphémère du designer Simon Husslein, dans laquelle il explore différentes combinaisons entre la lumière et l’espace et les sentiments que cela provoque sur le visiteur. Pour le designer, il ne s’agit pas de faire œuvre d’art, mais de démontrer le champ des possibilités comme une sorte de carte de visite à échelle humaine.

La scène se passe dans un quartier retiré de Zurich. Il faut commencer par prendre rendez-vous en ligne – la visite privée fait partie du dispositif. Au jour et à l’heure dite, vous sonnez à l’atelier de Simon Husslein, il vous accueille et vous mène à une seconde porte, dans le bâtiment adjacent. Il vous débarrasse de votre manteau, vous entrez dans une pièce noire et il ferme derrière vous. Il vous attendra à la fin du parcours.

La visite commence, vous êtes seul. Une musique légère flotte. Les murs sont noirs. Seule une bande illuminée court le long d’une paroi, signalant le chemin à suivre. Sur cette ligne lumineuse un texte est écrit, comme une profession de foi Simon Husslein y exprime le sens profond de sa recherche: l’expérience de l’espace, les impressions et les souvenirs que l’espace laisse en chacun de nous.

Ce premier couloir tout en rondeurs mène à une deuxième chambre. Elle est occupée par de grandes sphères de plastique transparent suspendues au plafond, vibrant et tourbillonnant librement sous l’effet de mini-hauts-parleurs posés à l’intérieur de ces sphères et susurrant des mélopées à peine audibles. Vous entrez ensuite dans une cabine haute et étroite où un écran diffuse une vidéo en continu. Caléidoscope de diverses références artistiques et philosophiques, comme un éclairage narratif sur l’expérience que vous êtes en train de vivre. La suite mérite de conserver son mystère, que l’on ne brûlera pas en disant qu’une luciole virevoltante vous attend et que vous pourrez vous relaxer sur une couche à déconseiller aux claustrophobes.

La lumière revient progressivement et Simon Husslein est à nouveau là, assis dans son coin café et vous en proposera un. Le temps d’un échange. Il vous expliquera ses intentions et ses projets futurs si vous le questionnez.

Exploration des relations simples

Il est par exemple en train de mener un cours sur la réalité virtuelle, à la HEAD de Genève, dans la section architecture d’intérieur. Il anticipe déjà le résultat avec gourmandise: «Ce qui m’intéresse, c’est précisément que les étudiants ne sont pas des spécialistes de la réalité virtuelle. Ce n’est pas un exercice de représentation hyperréaliste, mais une exploration des relations simples entre espace virtuel et espace réel, à l’aide de moyens simples.» Simple comme la lumière, comme la couleur, comme l’échelle, toutes des questions essentielles pour un designer complet.

Car Simon Husslein sait faire vibrer toutes les cordes de son métier. Il a pratiqué la création de produits, dans des champs aussi divers que le mobilier et l’horlogerie ­– il a créé de nombreux modèles pour la marque zurichoise Ventura ou pour l’allemande Nomos. Il vient de cocréer la marque Bòlido avec Pierre Nobs, créateur en son temps de la marque Ventura. Il a été directeur créatif du studio Hannes Wettstein, designer et architecte de référence dans le monde germanophone. Simon Husslein est aussi scénographe, spécialisé dans l’utilisation de la lumière. La cascade de prix de design décroché au cours de sa jeune carrière témoigne de la pertinence du travail. Démonstration en live à Zurich pour quelques jours encore.