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Des solutions pour éviter la surchauffe

Les urbanistes s’accordent sur la nécessité de densifier nos villes. Mais pas n’importe comment… car, avec l’augmentation des surfaces bétonnées et le manque de verdure, les températures ont tendance à prendre l’ascenseur.

En Suisse comme ailleurs, la tendance se poursuit : les températures augmentent et les événements extrêmes se multiplient. Les villes et les agglomérations souffrent particulièrement du réchauffement climatique : il fait en moyenne 2 à 3°C de plus en milieu urbain que dans les zones de campagne, ces écarts pouvant aller jusqu’à 7 °C. Plus de 400 villes du monde sont touchées par le phénomène des îlots de chaleur urbains, qui accentuent le réchauffement en journée et réduisent considérablement le rafraîchissement nocturne. Le principal impact concerne la santé, mais aussi la productivité des employés (nuit tropicale, journée étouffante, etc.) et donc l’ensemble du système économique, ainsi que la qualité de vie des citadins en général. Les facteurs qui contribuent aux îlots de chaleur sont l’insuffisance d’espaces verts et de zones d’ombre, l’absorption du rayonnement solaire par certains matériaux de construction et revêtements de sols, ainsi que le dégagement de chaleur par l’industrie, les bâtiments et le trafic.

Une mesure efficace : aménager des trames vertes et bleues, pour amener la végétation et l’eau au cœur des villes.

Les spécialistes considèrent que la morphologie urbaine – à savoir les formes et les configurations des infrastructures et des constructions – est la principale responsable de l’émergence des îlots de chaleur. C’est en fonction de ces paramètres que la chaleur est plus ou moins accumulée et peut rester captive. On mesure généralement les températures moyennes les plus chaudes au centre-ville, celles-ci augmentant avec la densité du bâti. Cela est toutefois à nuancer selon le type et la teinte des surfaces aménagées.

Les modes de construction en question

Pour éviter ou réduire les îlots de chaleur, diverses solutions existent. Des actions visant à renforcer le végétal et l’eau en milieu urbain sont prônées par de nombreuses municipalités. En effet, les plantes jouent un rôle de régulateur thermique important, d’une part grâce à l’ombre portée, mais aussi via l’évapotranspiration qui rafraîchit l’air. Quant aux points d’eau – fontaines, bassins, cours d’eau et lacs –, ils créent des microclimats, en réduisant les fluctuations de température et en augmentant l’humidité de l’air. Une mesure efficace de régulation consiste donc à aménager des trames vertes et bleues, pour amener la végétation et l’eau au cœur des villes.

Mais il s’agit avant tout d’intégrer le phénomène des îlots de chaleur dans la planification urbaine. Selon cette perspective, la densification doit veiller à préserver des espaces ouverts végétalisés et des aérations naturelles. La géographie des lieux, l’orientation des bâtiments et les vents dominants sont des facteurs à prendre en compte impérativement. Choisir avec pertinence le type de matériaux se révèle être une autre option efficace pour contrer la surchauffe urbaine.

La température dans les cités peut être abaissée de plusieurs de-grés si on agit sur la couleur et les propriétés thermophysiques des bâtiments et des sols. Plusieurs stratégies existent : utilisation d’un revêtement de sol ayant une forte capacité réfléchissante ; emploi de surfaces perméables telles que des grilles gazon ou des pavés alvéolés ; végétalisation du pourtour et des aires de parcage.

Le principal défi est de concilier les besoins de densification et le rafraîchissement des villes.

Deux cantons romands en action

Vaud et Genève, tout comme d’autres cantons, sont très actifs en matière de prévention des effets de la chaleur sur la santé et ont mis en oeuvre un plan canicule incluant un système d’alerte précoce. Important certes, mais intervenir en amont, par le biais de l’aménagement du territoire, est une stratégie devenue incontournable. La diversité des mesures évoquées montre bien la nécessité d’une approche transversale. Pas étonnant que cette mission ait été confiée au Service cantonal genevois du développement durable. La lutte contre les îlots de chaleur figure dans le Plan climat cantonal – volet 2, en tant qu’objectif spécifique d’adaptation (plan de mesures 2018-2022).

Des mesures concrètes

Dans ce document opérationnel, les actions prévues sont les suivantes :

  1. Inscrire dans le Plan directeur cantonal les principes à respecter pour prévenir et lutter contre les effets des îlots de chaleur : circulation de l’air, végétalisation (toitures, façades, etc.), création de zones ombragées, perméabilisation du sol, pénétrantes de verdure, etc.
  2. Effectuer une cartographie des îlots de chaleur afin d’identifier les points sensibles sur le canton.
  3. Élaborer une série de fiches techniques pour faciliter la prise de décision et favoriser les bons choix d’aménagement.
  4. Prévoir de nouveaux accès à l’eau pour la population dans le respect des milieux naturels : lac, cours d’eau, fontaines et autres ponts d’eau. Dans le canton de Vaud, la mise en œuvre de cinq projets d’agglomération contribue également au développement durable des zones urbaines. Cela en particulier par le volet « nature et paysage » qui accorde une grande importance au maintien et à la création d’espaces verts, dans le but notamment de réduire les îlots de chaleur et de favoriser la circulation d’air. On le comprend bien : le principal défi d’aujourd’hui est de concilier les besoins de densification dictés par l’aménagement du territoire et des exigences parfois – mais pas nécessairement – contraires, qui visent à favoriser le rafraîchissement des villes.