Excellence académique : la Suisse, un champion qui s’ignore

Quel meilleur investissement que l’enseignement ? Quelle plus grande richesse pour un pays que le savoir et la formation de ses habitants ?

Après avoir consacré un dossier à la situation pas vraiment enviable – elle est même franchement préoccupante – de l’école publique (voir IMMORAMA no 23, Automne 2008), nous avons souhaité poursuivre par un coup de projecteur sur nos instituts universitaires. Pour y observer une situation plus que réjouissante : nos universités et hautes écoles sont excellemment notées en comparaison internationale, à tel point que la Suisse compte plus d’établissements dans le palmarès du Times Higher Education1 que la France, par exemple. Ce secteur fait par ailleurs preuve d’une vitalité ébouriffante : une nouvelle université s’est créée à Lucerne en 2000 ; l’Académie d’architecture de Mendrisio a seulement 15 ans d’âge et aligne déjà plus de 700 étudiants et une flatteuse réputation internationale ; à Genève, le nombre de participants à une formation continue a explosé2 en vingt ans. Mentionnons également l’initiative Swiss Learning3, émanant directement de nos instituts d’enseignement et permettant de promouvoir activement l’image du secteur à l’étranger… Nos hautes écoles offrent tout à la fois la qualité et des prix plus qu’abordables, puisque les taxes universitaires y sont parmi les plus faibles au monde. Ce secteur, au-delà de la qualité de la formation dispensée à nos jeunes, est aussi une véritable industrie d’exportation, attirant une proportion importante d’étrangers, lesquels seront le plus fréquemment, lorsqu’ils retourneront chez eux, d’efficaces ambassadeurs pour notre pays.

Dans ce tableau très rose, quelques questions importantes se posent néanmoins : Est-il judicieux de subventionner si largement et indistinctement le coût des études universitaires, si l’on sait donc que les taxes moyennes se situent à quelque CHF 1 500.– par an pour un coût réel annuel de CHF 20 000.– à CHF 100 000.–4 par étudiant ? L’Université Bocconi à Milan a, par exemple, résolu le problème en fixant quatre seuils progressifs de contribution, selon la tranche de revenus des parents. D’autant plus que ce tarif suisse très (trop) favorable semble augmenter la durée moyenne des études… ce qui renchérit à nouveau les coûts ! Et dans certaines écoles « frontalières », Saint-Gall par exemple, de simples réflexes « d’arbitrage » produisent une surreprésentation d’étudiants allemands venant chercher là un diplôme précieux à un coût ridicule, ce qui n’est pas non plus le but recherché. Enfin, ces tarifs bas s’accompagnent de l’absence quasi totale de bourses pour aider les étudiants les plus démunis. On le voit, le savoir-faire, la qualité de la prestation sont incontestables, mais un débat doit avoir lieu quant à son juste coût et quant au financement, sous l’angle de l’égalité des chances certes, mais aussi dans le but d’assurer les ressources à terme de ce secteur, et de faire en sorte que les fonds publics y affectés bénéficient également à l’économie nationale. Une dernière question mérite d’être posée : Est-il scandaleux d’imaginer qu’un étudiant qui a bénéficié d’une formation de qualité à un prix favorable ait à rembourser un certain montant de prêt avec ses revenus professionnels ?

Notre tour d’horizon donne la parole à des représentants de nos instituts universitaires et à d’autres professionnels de la branche ; il vous offre également un petit tour du monde – du Canada à l’Afrique du Sud, en passant par la Suède et l’Australie – des pratiques dans ce domaine. Où vous apprendrez notamment que la Suède, pays « libéral-social » s’il en est, a rejoint l’Australie, la Chine ou l’Angleterre pour appliquer des tarifs fortement différenciés pour les nationaux et les étrangers…5

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